En France, l’analyse des coûts de la dégradation consiste à évaluer les coûts associés aux différents dispositifs de gestion du milieu marin existants. Il s’agit donc de mesurer l’effort consenti par la société pour faire face aux dégradations constatées du milieu marin. Cette évaluation des coûts est complétée par la caractérisation des impacts résiduels (IR) définis comme les dommages subsistants pour la société du fait de l’existence d’un écart entre la situation actuelle observée et la situation désirée telle qu’elle a pu être définie dans les dispositifs de gestion.
Comment est organisée l’estimation des coûts de la dégradation ?
L’évaluation de dispositifs de gestion du milieu marin est organisée au regard de la thématique de dégradation ciblée et du type de mesures déployées. Dix thèmes de dégradation sont considérés, tandis que les mesures de gestion sont réparties en quatre grandes catégories qui comprennent :
- des mesures ex-ante (déployées en amont d’un comportement dommageable au milieu marin) :
- les mesures d’information et de suivi liées à la collecte d’information, à la recherche appliquée et aux dispositifs de suivi et de surveillance du milieu marin ;
- les mesures de prévention qui consistent en des investissements/incitations économiques visant à empêcher les comportements dommageables à l’environnement marin ;
- des mesures ex-post (déployées lorsqu’un comportement dommageable au milieu marin n’a pas pu être empêché) :
- les mesures de préservation qui consistent à éviter les impacts sur le milieu marin, notamment par des mesures de dépollution ;
- les mesures de remédiation, qui consistent, lorsque des impacts sur le milieu marin n’ont pu être évités, à mettre en place des mesures curatives visant la restauration de la qualité du milieu marin ou la protection des populations humaines contre les impacts de la dégradation.
Total des dépenses et évolution
L’évaluation du cycle 3 de la DCSMM permet d’estimer à 2,4 milliards d’euros le coût moyen annuel de l’ensemble des dispositifs de gestion du milieu marin recensés en France métropolitaine (année de référence : 2020). Ces coûts sont en baisse par rapport à la précédente évaluation, où ils atteignaient 2,54 milliards d’euros (euros courants, soit 2, 65 milliards en euros constants 2020 ; année de référence : 2016).
Répartition des coûts par thèmes de dégradation
Les coûts associés aux thématiques de dégradation imputables aux activités humaines des bassins versants (questions sanitaires, micropolluants et eutrophisation) prédominent très largement (90 % des coûts recensés). Pour ces trois thématiques de dégradation, les mesures de préservation représentent 78 % des coûts (1,7 milliard d’euros dédié au traitement des eaux usées) et les mesures de prévention seulement 16%. La biodiversité bénéficie de 5,5 % des dépenses de protection du milieu marin, les ressources halieutiques de 2,3 %, les ressources conchylicoles de 1 % et les déchets marins de 0,63 %. Les autres thèmes de dégradation recueillent des montants très faibles, inférieurs à 10 millions d’euros par an.
Total estimé des coûts liés à la dégradation du milieu marin : 2 397 709 108 €
Répartition des coûts par types de mesures
Les dépenses liées aux dispositifs de gestion du milieu marin sont largement dominées par les mesures de préservation, qui représentent 70,6 % du total des coûts recensés. Viennent ensuite les dépenses liées aux mesures de prévention (17,5 % des dépenses), les dépenses de suivi et d’information (10,3 % des dépenses) et enfin les mesures de remédiation, qui sont de loin les moins utilisées (à peine 1,6 % du total des dépenses).
Dépenses 2020 des mesures de préservation
Les mesures de préservation se concentrent sur le traitement des eaux usées en vue de lutter contre les contaminations sanitaires, les micropolluants et l’eutrophisation. De ce fait, le traitement des eaux usées représente à lui seul également 70% du total des coûts de la dégradation, toutes thématiques et tous types de mesures confondus.
Quelques mesures de préservation concernent également les marées noires (collecte et stockage des déchets pétroliers à la source) et les déchets marins (collecte de déchets avant leur arrivée dans le milieu marin).
Total des mesures de préservation : 1 692 183 460 €
Dépenses 2020 des mesures de prévention
Les dépenses liées aux mesures de prévention bénéficient pour l’essentiel à la lutte contre les micropolluants (gestion des boues des stations d’épuration) et à la lutte contre l’eutrophisation (mesures agro-environnementales, réduction des intrants et des pollutions diffuses), et dans une moindre mesure à la protection de la biodiversité (acquisitions de sites par le Conservatoire du Littoral, mise en place d’Aires Marines Protégées) ainsi qu’à la gestion des ressources exploitées.
Total des mesures de prévention : 419 616 112 €
Dépenses 2020 des mesures de suivi et d’information
Les dépenses de suivi et d’information visent en priorité les thèmes des micropolluants, de la biodiversité et enfin des ressources halieutiques et conchylicoles.
Total des mesures de suivi et information : 247 671 127 €
Dépenses 2020 des mesures de remédiation
Les mesures de remédiation concernent essentiellement la biodiversité (actions de restauration des écosystèmes dégradés), les questions sanitaires (épuration des coquillages cultivés dans des zones classées B) et les déchets marins (ramassage des déchets dans les ports et sur le littoral).
Total des mesures de remédiation : 38 238 413 €
Répartition des coûts par façades
Les dépenses liées aux questions sanitaires sont les plus importantes dans la façade Méditerranée, celles liées aux micropolluants interviennent principalement en Méditerranée et en Manche Est – Mer du Nord et celles consacrées à la lutte contre l’eutrophisation concernent en priorité la façade Nord Atlantique – Manche Ouest.
Les dépenses de protection de la biodiversité sont les plus importantes en Méditerranée, celles consacrées à la gestion des ressources halieutiques sont assez équitablement réparties entre les façades avec tout de même une prédominance de la façade Nord-Atlantique Manche Ouest, enfin les coûts de gestion des ressources conchylicoles sont les plus élevés dans la façade Sud-Atlantique.
Les dépenses liées aux déchets marins sont les plus élevées dans les façades Méditerranée et Sud-Atlantique, celles consacrées aux marées noires et au bruit sous-marin sont assez équitablement réparties entre les façades avec tout de même une prédominance de la Méditerranée pour ces deux thématiques, enfin c’est également en Méditerranée que sont déployés les efforts les plus importants pour lutter contre les espèces non indigènes.
Total 2020 pour les façades et les différentes mesures : 2 397 709 108 €
Spécificités des façades
La façade Méditerranée totalise la plus grande part des dépenses de protection du milieu marin (35,4 % du total national) ; ces dépenses atteignent des montants comparables dans les façades Nord Atlantique – Manche Ouest (27,3 % du total) et Manche Est – Mer du Nord (23,2 %) mais nettement plus faibles dans la façade Sud Atlantique (14,2 %).
Façade Manche Est - Mer du Nord
La façade Manche Est – Mer du Nord occupe la deuxième place pour les dépenses de lutte contre les pollutions de type micropolluants (33,6 %) et eutrophisation (25,4 %), ainsi que pour les dépenses liées à la gestion des ressources halieutiques (23,5 %). Elle est celle qui reçoit la plus petite part des dépenses pour la protection de la biodiversité (15,3 % du total national).
Total : 556 022 065 €
Façade Nord Atlantique - Manche Ouest
La façade Nord Atlantique – Manche Ouest occupe la première place pour les dépenses liées à l’eutrophisation (41,5 % du total) et celles consacrées à la gestion des ressources halieutiques (35 %), et la deuxième place pour les dépenses liées aux questions sanitaires (26,4 %) et à la gestion des ressources conchylicoles (28,8 %).
Total : 653 649 035 €
Façade Sud-Atlantique
La façade Sud-Atlantique concentre la plus grande proportion des dépenses consacrées à la gestion des ressources conchylicoles (37,7 %). Elle occupe la deuxième place pour les dépenses de protection de la biodiversité (22,1 % du total national). La façade Sud-Atlantique est celle pour laquelle les dépenses liées aux pollutions issues des bassins versants (questions sanitaires, micropolluants et eutrophisation) sont les plus faibles.
Total : 339 927 886 €
Façade Méditerranée
La façade Méditerranée totalise la plus grande part des dépenses de protection du milieu marin (41 % du total national) ; ces dépenses atteignent des montants comparables dans les façades Nord-Atlantique Manche-Ouest (21,5 % du total) et Sud-Atlantique (22,1 %) mais nettement plus faibles dans la façade Manche-Est Mer du Nord (15,3 %) .
En raison de sa forte densité de population implantée sur le littoral, la façade Méditerranée concentre plus de 40 % des dépenses liées aux questions sanitaires, ce qui suffit à expliquer sa position de leader pour le total général des dépenses. Elle est également la façade où s’effectue la plus grande part des dépenses pour la lutte contre les micropolluants (34,6 %), la protection de la biodiversité (41 %), ainsi que pour les quatre thèmes de dégradation globalement les moins coûteux (déchets marins, marées noires, bruit et espèces invasives).
Total : 848 377 307 €
Rapports scientifiques :
Citation :
Infographies DCSMM cycle 3, 2024, AMURE, UBO, Ifremer, OFB, Cerema.